- La Terre
- 1) ZemljaDrame d'Aleksandr Dovjenko, avec Stepan Chkourat (Opanas), Semion Svachenko (Vassili), Ioulia Solntseva (la fille d'Opanas), Elena Maximova (la fiancée de Vassili), Piotr Massokha (Khoma), I. Franka (le koulak), V. Mikhaïlov (le pope), Pavel Petrik (le secrétaire du Parti), O. Oumanets (le président du Soviet), N. Nademsky (Semion).Scénario: Aleksandr DovjenkoMontage: A. DovjenkoPhotographie: Daniil DemoutzkyDécor: Vassili KritchevskyMusique: Lev RevouskyProduction: V.U.F.K.U. (Kiev)Pays: U.R.S.S.Date de sortie: 1930Technique: noir et blanc ; muetDurée: 1 704 m (environ 1 h 03)RésuméDans un verger luxuriant, le vieux Semion croque un fruit avec délectation, annonce tranquillement qu'il va mourir, et meurt. C'est l'époque de la collectivisation des terres dans les campagnes soviétiques. Les villageois sont partagés: les riches sont contre, les pauvres sont pour. Opanas, «paysan moyen», hésite tandis que son fils Vassili, ardent communiste, est l'âme de la collectivisation. Il entre dans le village au volant d'un tracteur et renverse le bornage d'un champ désormais devenu propriété commune. Dans la nuit claire, Vassili enlace tendrement sa fiancée, la main sur ses seins. Au retour, il danse de bonheur dans la poussière du chemin puis s'écroule, tué par un coup de feu. Tous les villageois suivent son cortège funèbre: les branches des arbres caressent son visage dans le cercueil ouvert. Au même moment, le meurtrier, un fils de «koulak», Khoma, en fuite à travers champs, proclame son crime et s'enfouit la tête dans la terre, partagé entre la haine et la fureur en voyant que Vassili, malgré sa mort ou grâce à elle, est vainqueur. La mère de Vassili accouche tandis que la pluie fécondatrice ruisselle sur les pommiers et sur le visage du mort.CommentaireLe chant de la terreLe génie de Dovjenko se manifeste de manière éclatante dans cet admirable film où il transfigure le thème politique en un hymne quasiment panthéistique à la vie, symboliquement plus forte que la mort. Le vieux Semion meurt et, avec lui, c'est l'ancien qui disparaît pour faire la place au nouveau, selon la terminologie du titre russe de la Ligne générale d'Eisenstein réalisé l'année précédente, et la naissance succède à la mort dans le cycle éternel de la vie dont témoigne aussi la nature à travers la pluie bienfaisante, les fleurs et les fruits, ces pommes qui sont le symbole de la poésie sensuelle et du lyrisme tellurique de Dovjenko.■ Chant du cygne du cinéma muet en U.R.S.S., animée par un puissant souffle épique, cette œuvre est aussi la plus magnifique version du chant de la terre qu'a été maint et maint film soviétique de la grande époque. Fils de paysans ukrainiens, Dovjenko est toujours resté proche de l'inspiration terrienne et de la poésie populaire: son chef-d'œuvre témoigne magnifiquement de son enracinement dans la nature et la culture de son pays natal. Si son écriture visuelle reste en partie fidèle à l'esthétique du montage rapide caractéristique du muet en U.R.S.S., elle annonce aussi, par sa lenteur contemplative et son sobre réalisme, le cinéma parlant.2) Drame d'André Antoine, avec René Alexandre (Jean), Armand Bour (Fouan), Germaine Rouer (Françoise), Jeanne Briey (Lise), Berthe Bovy (la Trouille), René Hiéronimus (Nénesse), Jean Hervé (Louis, dit la Belette), Milo (Hyacinthe), Jeanne Grumbach.Scénario: André Antoine, d'après le roman d'Émile ZolaPhotographie: Léonce-Henri Burel, Paul Castanet, René GaveauPays: FranceDate de sortie: 1921Technique: noir et blancDurée: 2 300 m (environ 1 h 25)RésuméJean arrive dans la Beauce et s'engage comme ouvrier agricole. Le père Fouan partage sa propriété entre ses trois enfants, Fanny, Hyacinthe et Louis marié à Lise. Il va vivre successivement chez chacun d'eux, qui le maltraite et ne s'intéresse qu'à son argent. Jean courtise Françoise, la sœur de Lise, et l'épouse. Mais elle est assassinée par sa sœur et Louis. Fouan, rejeté par tous, meurt seul dans un champ.CommentaireBardèche et Brasillach, dans leur Histoire du Cinéma, reprochent à Antoine de «rester homme de théâtre», de faire appel à la Comédie-Française quand il tourne la Terre. Pourtant, les acteurs du film ne sont pas plus démodés que d'autres, et Germaine Rouer possède même une beauté très moderne. Surtout, la réalisation est d'essence cinématographique et non théâtrale, par l'attention qu'elle manifeste au paysage, à la symbolique de l'image, à l'ellipse, au montage parallèle. Et l'esprit du livre est conservé, malgré une atténuation de l'horreur.3) TsuchiDrame de Tomu Uchida, d'après un roman de Takashi Nagatsuka, avec Isamu Kosugi, Akiko Kazami, Donguri Boya, Kaichi Yamamoto, Reizaburo Yamamoto.Pays: JaponDate de sortie: 1939Technique: noir et blancDurée: 1 h 32Film non distribué en FranceRésuméÀ la mort de sa femme, un paysan, harassé par son travail qui ne lui permet plus de survivre, en arrive à voler. Après des mois de dur labeur, il récolte enfin du riz et reprend courage.4) al-ArdDrame de Youssef Chahine, avec Mahmud al- Miligi, Izzat al-Alahili, Nagwa Ibrahim, Ahmad Hamdi, Yahia Chahine.Scénario: Youssef Chahine, Hassan Fuad, d'après le roman de Abdel Rahman SharkawiPhotographie: A. el-Halim NasrMusique: Ali IsmailMontage: Rachida Abd as-SalamPays: ÉgypteDate de sortie: 1969Technique: couleursDurée: 2 h 10RésuméÀ l'époque féodale de la monarchie de Farouk, un bey convoite la terre de paysans pauvres pour y construire une route desservant sa propriété. Avec l'accord du sheikh et la complicité de l'instituteur et du marabout, il exproprie les paysans. Ceux-ci se soulèvent: la révolte est sauvagement réprimée.CommentaireDans le contexte politique de l'Égypte nassérienne, ce film rend justice aux gens de la terre – peu représentés jusqu'alors dans le cinéma égyptien. En adaptant l'œuvre d'un écrivain engagé, Chahine dénonce sans détour la misère cruelle des paysans – locataires exploités, spoliés – condamnés à l'endettement perpétuel par des propriétaires tout-puissants. Malgré une mise en scène conventionnelle, la Terre touche par ses accents et ses explosions lyriques. Une fois de plus, l'auteur y montre son attachement au petit peuple égyptien.
Dictionnaire mondial des Films. 2014.